Histoires d'eau actes de la conférence annuelle sur l'activité scientifique du Centre d'études francoprovençales Saint-Nicolas, 15-16 décembre 2001 Rosito Champrétavy

Histoires d'eau L'eau des chateaux La considération commune à propos de la fourniture de l'eau aux chà­ teaux a toujours été que les fortifications situées sur les hauteurs recevaient de l'eau à travers l'utilisation de mulets ou d'ànes amenant à l'intérieur des enceintes des barriques en bois remplies de liquide. Arrivées en ce lieu elles auraient été déversées dans la citerne, réservoir situé en lieu sùr et destiné mème à desservir la construction en cas de siège de la part d'une armée d'en­ nemis. En étudiant les comptes de quelques unes des chàtellenies valdòtaines j'y pu constater qu'il n'était pas vraiment ainsi. La première documentation, la plus riche d'ailleurs, que j'ai rencontrée est celle relative aux travaux exécu­ tés à Cly à partir de 136717, année où la fortification est passée aux mains des comtes de Savoie. Dans les comptes relatifs aux années 1378 - 1382 en effet on voit apparaìtre des dépenses indiquées sous le nom de opera bornellorum. Il s'agissait là bel et bien des frais que le chàtela i n avait fait pour entretenir les bornelli de la fortificatìon. Par ce nom on appelait des troncs en bois de pin, portant un trou longitudinal. Ces morceaux de bois, de la longueur d'environ un mètre et demi, permettaient de créer un conduit souterrain qui amenait l'eau à l'intérieur de l'enceinte. Ces canalisations n'étaient ni faciles à réaliser et entretenir, ni très durables. Avant tout le problème qui se posait était bel et bien de perforer le bois en créant un tuyau fonctionnel. Au début probable­ ment on avait procédé par l'utilisation d'une tarière manceuvrée par des ouvriers experts dans l'utilisation qui demandait en tout cas une bonne pra­ tique pour maintenir un alignement précis avec l'axe du tronc. À Cly au contraire on procéda à construction d'une machine spéciale conçue expressé­ ment pour percer les bois. Il s'agissait d'un engin hydraulique, où une roue à auges transmettait la farce de l'eau à une grande tarière en fer du poids d'en­ viron douze kilos. Pour mouvoir la roue on dévia un petit torrent qu'on fit rentrer dans un conduit en bois dirigé vers l'engin. Ce type de machine devait ètre assez connu à l'époque tellement qu'on peut en admirer un dessin dans le Codex Madrilenus de Léonard de Vinci. Perforés les troncs le travail, ne se terminait pas. Les canalisations devaient ètre enfuìtes sous terre pour plu­ sieurs raisons : maintenir l'intégrité de l'ceuvre, la préserver en cas d'attaque ennemi, ne pas gèner les lieux à travers lesquels elle passait. Dans le cas de Cly en outre il était nécessaire de remonter une dénivellation de quelques dix mètres. On se servit d'une source située dans la colline en amont du chàteau et de là, à travers une tranchée langue d'environ six cents mètres, on se diri­ gea vers la fortification. Le point faible du conduit était certainement la jonc­ tion entre les différents morceaux. Afin de réaliser une structure solide on uti­ lisa des joins en fer, appelés vires, qui devaient garantir l'étanchéité et la durée des conduits. Ces éléments en outre nécessitaient de résister à unè certaine pression nécessaire à remonter jusqu'à la hauteur de l'édifice. Bien qu'on ait pris toutes les précautions pour réaliser une ceuvre solide, certainement le bois enterré ne durait pas longtemps, par conséquent les comptes de Cly rap­ portèrent très souvent des interventions, parfois très étendues sur les conduits d'eau. Le maintien de l'ceuvre était clone très coùteux. 16

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