Histoires d'eau actes de la conférence annuelle sur l'activité scientifique du Centre d'études francoprovençales Saint-Nicolas, 15-16 décembre 2001 Rosito Champrétavy

Histoires d'eau « Nouveau » n'est peut-etre pas le terme exact, car on connait de tels docu­ ments, ou du moins des articles isolés dévolus à la réglementation de l'arrosage des prés, pour le xrv· siècle au moins. C'est surtout l'arnpleur du phénomène qui représente une réelle nouveauté. On assiste en effet, dès le début du XV• siècle, à une vague de rédaction de tels écrits ; ce phénomène perdurera d'ailleurs tout au long de la période moderne. Voyons donc maintenant quelles sont les sources disponibles pour le cherchetlt sur les traces des bisses du Valais au Moyen Age. Aux sources de l'irrigation : quels documents ? Dès le XIII• siècle, on retrouve des documents écrits concernant les bisses, ou qui parfois n'en comportent qu'une discrète mention. Ces sources devien­ nent beaucoup plus nombreuses et plus explicites aux XIV• et XV• siècles. Elles peuvent etre réparties en trois catégories principales9• La première contienf des actes privés, souvent des ventes ou des échanges de biens fonciers ouirnrnobiliers, qui mentionnent les bisses comrne limites d'un terrain, ou les droits d'eau attachés à une parcelle. Ce sont, en matière de bisses, les plus anciennes sources connues à ce jour. Elles confirment utilement l'existence d'un bisse à telle époque, mais ne nous apprennent pas grand-chose SUI l'organisation de l'irrigaticm et SUI le ròle du bisse. La deuxième catégorie regroupe les documents de procédure, fruits des incessantes querelles autour des bisses et de l'utilisation de l'eau. Des conflits éclataient assez fréquernrnent entre les cornrnunautés, surtout au sujet des com­ muns, et ils pouvaient durer très longtemps. Ceux qui concernaient l'eau étaient particulièrement violents dans certaines régions, et menaient souvent à l'appel d'arbitres extérieurs aux cornrnunautés, et à des procès devant l'autorité seigneuriale. De riches dossiers, avec auditions de témoins et sentences arbi­ trales, ont été conservés jusqu'à aujourd'hui10• Des querelles pouvaient aussi éclater à l'intérieur meme de la communauté ou du consortage au sujet des droits d'eau. La trbisième catégorie de documents est celle qui m'intéresse plus parti­ culièrement. Elle comprend les textes normatifs de la gestion des bisses. Ils se présentent sous différentes formes : règlements ou statuts, ratements, articles inclus dans l'arbitrage d'un conflit ou dans un règlement cornrnunautaire. Les statuts d'un consortage de bisse sont souvent édictés lors de la construction de l'ouvrage, ou peu après. Ils définissent les dròits et les devoirs des consorts, nornrnent les responsables du bisse, organisent l'irrigation et prévoient l'entre­ tien du canal. On trouve parfois, en complément de ces règlements, le « rate­ ment » du bisse, c'est-à-dire la répartition des droits d'eau entre les consorts. Le ratement peut aussi se présenter comme un document isolé, particulièrement dans le cas où il est postérieur au règlement. Les ratements étaient d'ailleurs 22