Histoires d'eau actes de la conférence annuelle sur l'activité scientifique du Centre d'études francoprovençales Saint-Nicolas, 15-16 décembre 2001 Rosito Champrétavy
L'historien sourcier. À la recherche de l'eau dans les comptes des chatelains savoyards Les officiers locaux du comte ne font pas qu'encaisser des fermes : ils veillent sur le monopole dont leur maitre semble, dans ce domaine, jouir à Saint-Maurice. C'est qinsi qu'en 1405-1407, une vingtaine de personnes sont condamnées par le chatelain pour avoir peché et vendu du poisson sans autori sation73. Quatre autres personnes sont amendées pour le meme délit en 1415- 141674. Il serait intéressant d'approfondir la recherche à propos de ceux qui exploi tent ces loye. Je ne suis pas certain qu'il s'agisse à chaque fois de pècheurs. En 1463, par exemple, l'inventaire des biens de Perrod Nepotis, considérable bour geois de Saint-Maurice condamné à mort pour « hérésie », mentionne « la moi tié de deux loye en indivision avec dom Jean Combassie, au lieu-dit le Bois Noir »75• Ce notable et ce prette s'adonnaient-ils eux-memes à la peche ? Ne louaient-ils pas plutot leur loya à un pecheur, contre une somme qui couvrait au moins la ferme par eux versée ? Les pecheurs et le commerce des poissons apparaissent aussi dans la partie judiciaire des comptes de chatellenie. Entre 1330 et 1332, quelque part dans la vaste chatellenie de Chillon, JeanMugnier paie 3 sous de gros tournois au cha telain, « parce qu'il avait vendu des poissons dans un endroit inhabituel »76• En 1340 ou 1341, Abraminus, un juif de Villeneuve, paie 2 sous de gros tournois au chatelain de Chillon « parce qu'il avait emporté des poissons des bancs du mazel, sans la permission du propriétaire de ces poissons »77• En 1341-1342, six personnes de Noville paient d'assez fortes amendes (entre 20 et 30 sous lausan nois) au chatelain de Chillon « pour avoir vendu des poissons à des marchands de Villeneuve à Noville, avant de les avoir présentés dans la halle du marché »78. En 1425 ou 1426, Udricus Pittet est accusé de parjure : alors qu'il avait affirmé sous serment n'avoir pas transporté de poissons à Lausanne pour les vendre, on a constaté le contraire79• Sur la clientèle des pecheurs que nous avons observés, à Saint-Maurice ou ailleurs, on ne sait pas grand-chose. D'importantes quantités de poisson séché ou fumé étaient consommées pendant le Careme et les jours de restriction ali mentaire ; il ne s'agissait cependant pas de poissons indigènes, mais de pois sons importés, achetés principalement sur les foires de Genève80• En revanche, des poissons frais apparaissent, dans de grandes occasions, à la table. des cha noines du Grand-Saint-Bernard ou à celle des chanoines de Saint�Maurice. C'est aussi l'occasion d'en apprendre plus sur les pecheurs valaisans. Les cha noines de l'Hospice achètent par exemple à Ansermodus de Bagnes, demeurant à Saint-Maurice, six truites en 1473 et vingt et une en 1476 ; ces poissons leur coutent très cher81• D'après les comptes qu'il tient pour les recettes et les dépenses de sa mensa entre 1334 et 1348, Barthélemy, abbé de Saint-Maurice, s'approvìsionne auprès de plusieurs fournisseurs de poisson frais, pendant les périodes de restriction du Careme et de l'Avent, ainsi que le vendredi. Il est essentiellement, pendant toute la durée couverte par les comptes, client d'une certaine Marguerite de Vérossaz, de Saint-Maurice82• L'abbé achète également 63
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