La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

Lettre 11 7 1 09 bien la philosophie morale, et difficilement pourra-il achever le cours qu'il a commencé, s ' i l n ' etudie mieux qu 'il ne fait. Vous m'entendés bien2. M. le Cardinal est plus puissant que jamais. Son merite, et son bonheur sont, ce semble, deux colones inebralanbles ou deux fondements eternels, qui / (f" lv) soutiendront sa dignité, et son pouvoir. On donna devant hier la charge des vivres pour la campagne procheine, qui se doit faire en Flandres. M. le comte d ' Harcourt, à ce qu'on tient, commandera l ' armée3; il a tant donné de preuves d 'une fidelité inviolable, et d ' un attache­ ment aveugle aux interests des puissances, qu'elles en font leur bras droict. J'en suis ravi de joye, car il est vrai que ce seigneur est tout à Madame Roya­ le, et ne perd point d ' occasion de luy rendre service4. Quand il arriva de Nor- mont, soit en tant que créature de Mazarin (cf. lett. 1 65, n. 1 3). Sur ce personnage, cf. D. de BROGLIE, Les B ro glie . Leur histoire, Paris, Editions du Palais Royal, 1972, pp. 68-79. Une autre hypothèse sur l'identité cachée sous ce pseudonyme ferait penser au Cardinal lui-même, surtout sur la base de la let­ tre 126, où il est question du mariage de ! 'une de ses nièces (cf. note 1 1 ), mais cette identification n'e­ st pas valable pour l'ensemble de la correspondance. En particulier, Marie-Madeleine Laurain-Porte­ mer, à qui nous nous étions adressées pour avoirdes élucidations, nous a fait remarquer que pour la let­ tre du 29 octobre (n. 166), s'il s'agissait de Mazarin, Bailly "commettrait une très grande faute vis à vis de ses maîtres (...). En effet, Bailly dit bienque toutce qu'il a dit sur le prétendu beau-frère est captieux; maisdanscecas il aurait trahi la fidélité desesmaîtres en ne les renseignant pa5 exactement surle com­ portement ou les réactions du ministre". On pourrait donc supposer que, pour brouiller ultérieurement les pistes, Bailly se serve de ce pseudonyme pour désigner tantôt Broglia, tantôt Mazarin. Une troisiè­ me hypothèse à l'égard de ce personnage pourrait être formulée à partir de !'Historiette de Tallemant où il est question d'une chanteuse, appelée la Sandrier (op. cit., t. II, p. 270), que le marquis de Saint­ Thoma5 avait aimée lors de son séjour à Paris comme secrétaire d'ambassade. Cettefemme se faisait appeler M.lle de Saint-Thomas, parce que le secrétaire piémontais l'aurait épousée, mais il lui aurait volé par la suite toutes les piècesjustificatives de ce mariage. Elle était très appréciée par Mazarin, qui lui avait octroyé une pension. Le "prétendu beau-frère" pourrait donc être un frère de la Sandrier. 2 Ces allusions nous restent obscures. 3 Le comte d'Harcourt commanda l'armée royale dans la campagne de Flandre pendant le printemps et l'été 1 649 (cf. lett. 1 05, note l ); le 10 avril, il avait aussi obtenu le gouvernement d'Alsace, comme recompense poursafidélité au parti de lacourpendant leblocus de Paris; en effet, il était rentré à Saint­ Germain au mois d'avril, après avoir commandé l'armée royale en Normandie; pour ses actions mi­ litaires dans cette province, cf. lett. 1 35, note 17 et C HÉ R UE L , op. cit., t. III, pp. 1 64-65, 228-31 . 4 En 1 639, le comte d'Harcourt avait été envoyé au Piémont pour remplacer le cardinal de LaValet­ te, qui était mort cette année-là. Harcourt commanda donc l'armée française pendant la guerre civi­ le entre le parti de M.R. et celui de ses beaux-frères, les princes Maurice etThomas de Carignan. Le comte remporta une importante victoire contre l'armée espagnole au siège de Casai et réussit à dé­ faire les troupes du prince Thomas près de Moncalieri; pendant le siège de Turin, il parvint à déli­ vrer la ville des troupes ennemies (20 septembre 1 640) et l ' année suivante, il occupa Ceva, Carrù, Mondovi et Cuneo; il ne parvint pas à conquérir la ville d'Ivrea, qui était sous le gouver­ nement du prince Thomas, mais le parti des "principisti" fut quand-même défait. Cf. G. AMo­ RETTI li ducato di Savoia da/ 1559 al 1 713, Torino, D. Piazza, 1 985, 4 vols, t. II, pp. 1 53-54 ss.; G. CLARETIA, Storia della reggenza ( .. .), cit., pp. 2 1 1-396.

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