La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

Lettre 1 20 1 2 1 qui sont à Blaie7. L'advocat general de c e Parlement8 est ici, pour faire l ' / (t'°3r) accommodement de cette compagnie. Il a esté fort mal receu de Son Eminence et particulierement de M. le Chancelier qui, aprés avoir ouy sa ha­ rangue un quart d 'heure durant, se mit à rire sans luy dire un seul mot. Ce sont là de certaines especes de mortiffication plus sensibles que celles des cloitres. On presse nostre Coadjuteur d'aller voir le Roy, et la Reyne, mais à condition que M. le Cardinal l 'introduira, et recevra ses respects. Ce prelat tres altier consent bien au premier chef, il est prest d'aller faire la reverence à Leurs Magestés et mesme de voir M. le Cardinal, mais de son bon gré, et ne veut point pour tout de condition, ni d'obligation9. M. le Chancelier menage cette delicatesse. 1649, lors de la Fronde parlementaire, il dut luttercontre le Parlement, avec qui il était en conflit de­ puis longtemps; le différend éclata au sujet du ravitaillement de la garnison du Château-Trompette et de la construction d'une citadelle à Libourne. Par celle-ci, Epernon comptait dominer la ville de Bordeaux et se procurer un asile au cas où il dût abandonner la ville; mais le Parlement s'y opposa en vertu d'un ancien privilège de la ville, qui interdisait le stationnement des troupes dans les dix lieues autour de Bordeaux. Mazarin fut contraint d'envoyer le duc d'Argenson comme intermé­ diaire entre les deux parties. En un premier temps, celui-ci avait obtenu du Parlement l'autorisation au ravitaillement du Château-Trompette, à condition que la fortification de Liboumes fût détruite. Mais puisqu'Epemon ne tint pas sa promesse, Argenson fut obligé d'envoyer auprès de lui son fils, tandis que lui-même resterait à Bordeaux comme ôtage. Finalement, au début du mois de mai, Ar­ genson père fut autorisé par le Parlement de Bordeaux à se rendre lui aussi auprès d'Epernon, qui promit de raser les fortifications de Liboumes. Mais le 16 mai, la population de Bordeaux se croyant trahie, décida d'attaquer le châteauTrompette, ce qui constitua une défaite sanglante pour les troupes parlementaires. DBF, t. XII, 1 970, col. 1 34 1 -42. Sur la Fronde bordelaise, cf. F. L OT R E ITE , C. J o u­ HAUD, La Fronde et les mazarinades bordelaises, "Bibliothèque de la Section d'Histoire Moderne et Contemporaine", 1 2 ( 1980), pp. 1 68-74; S. A. WESTRICH, The Ormée ofBordeaux: a Revolution during the Fronde, Baltimore, John Hopkins University Press, 1972; R. C H AR T ŒR , L'Ormée deBor­ deaux, "Revue d'Histoire moderne", 2 1 ( 1 974), pp. 279-83. 7 Recte: Blaye, chef-lieu du département de la Gironde. 8 L'avocat général du Parlement de Bordeaux s'appelait Thibaud de Lavie (ms. f. fr. 25025, f" I 05r ss., DusurssoN, op. cit., 1. 1, p. 280, t. Il, p. 421 ). Il se rendit d'abord à Compiègne, puis à Paris pour plaider la cause du Parlement de cette ville contre le duc d'Epemon, gouverneur de la Guyenne. Cf. Th. B AZO T , Le parlement de Bordeaux et /'avocat général Thibaud de Lavie sous la Fronde, Bordeaux, 1 870. 9 En effet, Gondi ne se rendit à Compiègne faire ses hommages à la reine que peu detemps avant le retour du roi à Paris, mais à cette occasion, il refusa de voir Mazarin. M. me de Motteville af­ firme que la première entrevue entre le Coadjuteur et Mazarin eut lieu le 1 9 août. Voilà ce qu'écrivait Séguier à Le Tellier, dans une lettre du mois d'avril 1 649 :"M. le Coadjuteur m'est venu voir, qui me parla de diverses choses et conta en passant qu' il étoit près de saluer la Reine, et qu'ensuite il rendrait ses respects à M.le Cardinal, pourvu que l'on ne lui mît le dernier en condition". (M. MOLÉ, op.cit., t.IV , p.4 1 , note 1 ). Dans ses Mémoires, Retz raconte avoir expli­ qué à Condé, lors de son séjour à Paris vers la mi-avril, qu'il ne se rendait pas à Compiègne par crainte d'être emprisonné (op. cit., p. 285).

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