La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

1 44 Correspondance d'A . Bailly - 1649-1650 (f04r) Le marquis d'Amilly l 1 , et que je pleure avec des larmes de sang pour avoir perdu un illustre ami, a esté mal'heureusement tué dans une de ses mai­ sons par un gentil-homme qui luy estoit allé faire un appel de la part d'un sei­ gneur son voisin, voici comment. Comme ce gentil-homme, et second, luy fai­ soit cet appel, la mere l 2, la femme1 3 , et une demoiselle entrerent au l ieu où ils estoient. Et l'appellant, surpris de leur venue, fut saisi d'une terreur panique si etrange qu'il se mit à crier tout haut: "Je suis trahi , Marquis, tu es un traistre " . Et comme ces outrages porterent ce seigneur à l uy sauter dessus, e t à le desar­ mer, ce cruel tira une baionette, et luy en donna deux grands coups, dont il est mort. Ce meurtiier ne s'arreta pas là, il blessa aussi la mere du Marquis, et la de­ moiselle à mort. La femme se sauva. Un valet de chambre qui voulut arreter ce furieux, fut aussi assassiné. Enfin un autre valet de chambre, entendant les cris, s'arma d'une epée, et courant au lieu d'où venoient les pleintes, il vit ce bour­ reau et, sçachant ses cruautés, le tua sur la place. De là, il courut à un bourg pas bien loin de ce chasteau pour amener des chirurgiens, et rencontrant le seigneur qui avoit fait faire l'appel, monté sur un puissant cheval, deux pistolets à l'arson de sa selle, et attendant de pied ferme le Marquis, ce serviteur, enivré de cole­ re et transporté de la douleur de perdre un ancien maistre, attaque brusquement ce cavalier, le desarme, et le meine, luy seul, dans les prisons du bourg, où il est encore. 1 1 Il pourrait s ' agir de Jean d'Amilly, officier indiqué comme marquis (mais ce titre lui avait été vraisemblablement attribué par courtoisie); il est le plus souvent qualifié de chevalier, sieur du lieu et de La Bernardière. En 1 627, il avait été capitaine d'une compagnie de chevaux-légers. Fi­ dèle au parti de la cour pendant la Fronde parlementaire, le 1 6 janvier il fut chargé de lever un régiment d'infanterie et un de cavalerie à dix compagnies pour le service du Roi. li se rendit donc dans le Maine et l'Anjou, ce qui provoqua, le 8 mars, un arrêt contre lui, accusé d'utiliser l'argent des recettes pour lever des troupes. Il avait été nommé maréchal de camp le 27 mars; d'après le DBF (t. II, col. 672), il aurait quitté le service à la fin des troubles. Le récit de sa mort serait donc inédit. Les mémoires de Goutas récemment publiés par N. Hipp (Mémoires et autres inédits de Nicolas Goutas, Gentilhomme ordinaire de la chambre du duc d' Orléans, publiés d'après des manuscrits autographes pour la société de ! 'Histoire de France par N. HlPP, Paris, Champion, 1 995, pp. 60 etpassim) citent à plusieurs reprises les membres d'une famille alliée des Goutas et nomméeGrangier de Bellièvre, dont l ' un de ses membres, Claude, porte le titre de sieur d'Amil­ ly; il avait épousé Marguerite Grangier, dont il eut deux filles et un enfant mâle, qui hérita le titre de sieur d'Amilly et que Goutas cite à plusieurs reprises à l 'occasion d'un voyage en Italie en­ trepris en 1 625. 1 2 Au cas où la seconde hypothèse que nous avons formulée à la note 1 1 à propos de ! 'identité du marquis d' Amilly serait la bonne, la mère du sieur d 'Amilly serait Marguerite Grangier. l 3 Les mémoires de Gaulas (cit., cf. note 1 1 ) ne font pas mention d'une femme éventuelle du sieur d'Amilly; par contre, le Père Anselme (op. cit., t. IV, p. 403 B) affirme que Jean d'Amilly avait épousé en 1 643 Marguerite Mangot.

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