La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

Lettre 158 267 les merveil les de Maison, juroient qu ' il n ' y avoir rien d'egal en toute l ' Italie. "Ouy", dis-je, "si vous en avés osté le Valentin". Et je fus tres fasché de ne l ' avoir assés consideré, pour en faire la matiere de mon babil. J'en dis neant­ moins, ce me semble, assés pour leur persuader que Maison n 'estoit pas sans pareille. M. Rossignol v ient de sortir de ma chambre, que j 'estime plus que Maison; et quoi qu' i l bredouille tres forte, cependant j ' ay recueilli de tout son discours sans consequence mais en these, que M. le Cardinal, quoi qu 'on puisse dire, et escrire, est aussi bien que jamais; que M. le Prince avoit impatience de se re­ concilier; que les frondeurs frondent contre luy, disant qu ' i l les avoit embar­ qués sur la Seine pour les mener bien loin, et qu' i l les a fait echouer au Palais CardinaJI4. Qu'ils ne se fieront plus à cette Altesse si facile à se r' accomoder, et qu 'ainsi Son Eminence rencontre la fortune au mesme lieu où l 'on croit qu'ellef le quitte. Que Messieurs des Gabel les 1 5 , dont l ' un appellé M. Riche­ bourg l 6 est son beau pere, ont eu arrest ce mattin pour sortir de la Maison de Ville, qui leur a servi de prison 1 7, moienant 64. mille l ivres qu'ils paieront 14 L'allusion fait référence au traité secret, mais divulgué par la gazette manuscrite f. fr. 25025, f"l0 3 r (cf. P. G. LORRIS, op. cit., pp. 1 23-24) signé par Condé et Mazarin le 27 septembre et dé­ posé entre les mains du premier président Molé le 2 octobre, par lequel le Cardinal remettait une grande partie de ses pouvoirs au Prince et renonçait au mariage de sa nièce Laura Mancini avec le duc de Mercoeur. En outre, la reine donna le gouvernement du Pont-de-L'Arche au prince de Conti, conformément au traité de Rueil. Cf. A. CHÉRUEL, op. cil., t. III, pp. 296-97 et 299. Cette réconciliation fut une déception pour les frondeurs, qui avaient essayé de pousser Condé à faire chasser le Cardinal et à donner les plus hautes charges de l'Etat à des anti-mazarins. 1 5 La gabelle était l'impôt sur le sel, qui constituait une source importante de revenu pour les caisses royales; la France était alors divisée, au point de vue des gabelles, en six parties, de con­ dition très différente: le grandparty, qui comprenait entre autres l'Ile-de-France, était le territoire où le sel y était le plus fortement taxé et où une quantité minimale de consommation de sel y était obligatoire; les pays exempts (Artois, Flandre, Hainaut, Béarn, Navarre, une partie de l'Aunois et du Saintonge, Bretagne) étaient ceux où le commerce du sel était libre. Entre ces deux situations extrêmes, on comptait les pays depetite gabelle, lespaysdes salines, lespays rédimés et le Quart Bouillon, où le montant de la gabelle était varié. Le faux saunage était très commun à l 'époque, surtout dans les régions au contact avec les pays exemps et les pays de grande gabelle, les pei­ nes étaient terribles, mais généralement plus comminatoires que réelles. M. MARION, op. cil., pp. 247-48. I6 Bonaventure Quentin, sieur de Richebourg, beau-père d'Antoine Rossignol. Le mariage entre celui-ci et Catherine Quentin avait été célébré par Bailly (lett. 150). 1 7 Le 1 4 juillet, un arrêt du Conseil du Roi avait établi que le paiement des rentes, interrompu pendant le blocus, reprendrait le 1 5 septembre; toutefois, le 22 septembre, les rentiers de l 'Hôtel de Ville découvrirent que les fonds destinés au paiement de leurs rentes, délégués aux fermiers des gabelles, avaient été versés dans d'autres caisses de l 'Etat. Nous rappelons au passage qu' à

RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=