La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

22 Correspondance d' A . Bailly - 1649-1650 deux exemples seulement de cette prononciation soient présents dans nos docu­ ments. En plus de celui que nous venons de citer, nous signalons le cas du sub­ stantif pourmenades (lett. 1 44) , qui reproduit la prononciation populaire du pré­ fixe pro-, condamnée par Vaugelas dans ses Remarques4. Un cas opposé, de pro­ nonciation ' non-ouiste ', est représenté par le nom propre Tolose (lett. 1 27). La prononciation du digramme -oi semble elle aussi rester incertaine, comme le montre l 'orthographe du substantif boette (lett. 1 1 0, mod. boîte) : la forme [we] prévaut ici sur [wa] , condamné par les grammairiens du XVIIe siècles. La forme de l 'adjectif vuide atteste par contre que la diphtongue [wi] n'a pas en­ core été réduite à [i] derrière consonne vélaire6. Pour ce qui concerne l ' -e instable, la graphie atteste qu'il est tombé dans la pro­ nonciation des adverbes constitués avec le suffixe -ment (<lat. -amentum, cf. maniment, lett. 1 1 6, remerciment lett. 1 02); le -e instable est muet aussi entre occlusive ou fricative et liquide (dernier, esprit). Par contre, les formes du ty­ pe asseurance, veu, deues montrent la volonté de conserver au moins dans la graphie le -e étymologique. Quant à la dénasalisation, la graphie baronie, debonaire, accomodement attes­ tent vraisemblablement que la voyelle conserve encore son articulation nasale, alors que les formes du type sammedi montrent par la présence de la géminée l 'aboutissement du processus de dénasalisation de la voyelle prétonique. En­ fin, Bailly suit l ' avis de Vaugelas dans l 'emploi de l ' adjectif eminent, utilisé à la place d' imminent dans l 'expression peril eminent (lett. 1 20), la ruine emi­ nente (lett. 1 83): dans la forme dénasalisée, la consonne nasale a causé l 'ou­ verture de -i7; la préférence du grammairien pour cette forme tient au fait qu 'el­ le permet d 'éviter la rencontre de trois -i. Le consonantisme aussi peut donner Lieu à quelques remarques intéressantes. En particulier, le groupe explosif -pl, généralement conservé en position for­ te, est passé à pr dans le participe rempris, en conséquence d' un procédé d' assimilation ou à cause du phénomène du rhotacismes. Les formes des sub­ stantifs regitre, enregitrement et celles du verbe regitrer (lett. 1 1 0, 1 1 1 , 1 1 6 4 lhid., t. I, pp. 256-60. 5 P. FOUCHÉ, op. cit. , t. II, pp. 272-75 et 283-84. 6 lhid , t. II, p. 288. 7 C. MARAZZA, Prob/emi di lessico ne/le 'Remarques' di Vaugelas, dans La linguafrancese ne/ Seicento, prefazione di M. GROSS, Bari-Paris, Adriatica-Nizet, 1 989 ("Quademi del Seicento francese", 9), pp. 27-40, en particulier la p. 38. Vaugelas semble croire que la substitution de -i avec -e serait justifiée par des raisons euphoniques, afin d'éviter la rencontre de trois -i. 8 P. FOUCHÉ, op. cit., t. III, pp. 69 1-92.

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