La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello
278 Correspondance d'A. Bailly - 1 649-1650 et je luy envoie par cet ordinaire la copie de la ligue tabouretique2, mais on les a remis en leurs places, et promettent de ne la point quitter, puisqu 'on leur pro met de les laisser vuides. Je me rencontrei l ' autre jour chez une persane de condition (et qui voiant mon chapelet, l 'emprunta pour s ' en parer ce jour là)3. M. le chevalier Savigni4, ar chifrondeur, y vint, et estant interrogé par le mari de cette dames de l ' evene ment de leur union, il repondit qu ' elle alloit bien jusques là, mais que cent gen tils-hommes masarins avoient pris place Je mattin dans l 'assemblée, et acco modé le different au gré de la Court, et que les Antitabouretiers estaient joués, et flambés6. Je voiois bien qu'il vouloit dire que la mesme main qui avoit levé les tabourets, les avoit remis en leur lieu, ce qui n ' a point d 'apparence, car on remarqua que la harangue que fit le mareschal de l ' HopitaF à la Reyne contre les tabourets la surprit extremement, et mesme la fit rougir. Tant y a, Madame, qu'il n ' y a plus au monde d' Antitabouretiers. 2 Elle ne nous est pas parvenue; le texte a été reproduit dans les mémoires d'O. Talon, op. cit., p. 366-67. 3 Il s'agit vraisemblablement de Magdeleine Fabri, femme de Pierre Séguier (cf. lett. 1 56); sa passion pour les chapelets a été évoquée dans la mazarinade intitulée Le Silence au bout des doigts, où l'on peut lire la phrase suivante: "La Chancellière (...) a plus de galans que de chap pelets, bien qu'elle en ayt une infinité". 4 René-Renaud de Sévigné ( l 607- 1 676), chevalier de l 'ordre de Malte depuis l 622, capitaine au régiment de Normandie en 1 630, combattit pendant huit ans ( 1 640- 1 648) en Italie et entra en contact avec la duchesse de Savoie, qui le chargea, à partir de 1 65 1 , de lui envoyer une corres pondance régulière pour l'informer des évènements de la deuxième Fronde. Lié au cardinal de Retz, le chevalier de Sévigné défendit son ami jusqu'au moment de son embastillement et four nit à la duchesse Christine un précieux témoignage sur le point de vue des frondeurs. Chargé de la tutelle des enfants du marquis de Sévigné, son frère, il abandonna la cour pendant un an lors de ! 'emprisonnement de Retz et ne rentra à Paris que pour s'enfermer à Port-Royal. Il figure par mi les signataires de la déclaration de la ligue tabourétique. Cf. Correspondance du chevalier de Sévigné et de Christine de France, duchesse de Savoie, éd. J. LEMOJNE et F. SAULNIER, Paris, Re nouard, 1 9 1 1 ("Société de ! 'Histoire de France"). 5 Pierre Séguier. 6 Dans les assemblées de la noblesse, l 'on discutait aussi d'une réforme de l 'Etat et de la convo cation des Etats Généraux; la reine, pressentant le danger, envoya les maréchaux d'Estrées, de Schomberg et de Villeroy, qui lui étaient particulièrement fidèles, pour présider les assemblées; en outre, lors de la délibération sur le brevet d'abolition des tabourets, elle y envoya tous les gentilhommes de la maison du roi et de la sienne, ainsi que ceux de la maison du duc d'Anjou et du duc d'Orléans, ce qui fit que l'on se contentat du brevet de la reine au lieu de la déclaration vérifiée par le Parlement demandée dans un premier moment. Cf. MONTGLAT, op. cit., p. 220. 7 François de l 'Hôpital.
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