La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello
Leure 166 299 La Court des Aides3 avoit envoié deux conseillers, l ' un enAuvergne, et l 'autre en Bourbonois, pour faire paier les tailles, seulement selon la declaration du mois d'octobre de 1 648. Les peuples se sont soulevés et ont assiegé ces commissaires. Les Bourdelois ont rasé, avec une temerité etrange, le Chateau Trompette et la maison du gouvemeur4; quelle horrible plaie a l ' autorité royale ! Vous me ferés plaisir de dire à l 'oreille à Madame que celuy qu'elle appelloit son grand Borgnes à Querasc, conseilla à Son Eminence de se retirer quand il estoit menacé par M. le Prince, et qu 'on ne sçait ce que ce conseil produira de bon, ou plustost de mal pour luy. Secretumb meum tibi amico6. Gardés vous de ! 'Ambassadeur. Quand j 'ai escrit à Madame de M. le comte Broglia7, je 3 Sur les fonctions de la Cour des Aides, cf. lett. 99. Après le blocus de Paris, on avait eu d'énormes difficultés à rétablir le paiement des tailles et des gabelles. 4 ABordeaux, au cours du mois d'octobre, les bourgeois avaient demandé en vain que le château Trompette, occupé par les troupes du gouverneur Epernon, passât entre les mains de la ville et en avait même présenté une requête au Parlement de Paris par l 'intermédiaire de ses députés La Vie et Guyonnet; puisque cette requête fut refusée, ils investirent le château Trompette le 22 octobre et entre la fin du mois et le début de novembre ils travaillèrent à le raser. 5 Abel Servient avait été envoyé à Querasc au mois de février 1 63 1 en tant que représentant de Louis XIII dans la grande session diplomatique réunissant tous les états intéressés par la paix de Ratisbonne. La ville piémontaise, résidence des ducs de Savoie pendant la peste de 1 630, avait été choisie par Mazarin, alors collaborateur de Richelieu, pour des raisons diplomatiques: le rap prochement du duc Victor-Amédée 1 à la France nécessitait d'être renforcé et en outre, Mazarin entendait proposer au duc de Savoie trois traités secrets qui constituaient de véritables chaînes liant le duché à la France. Sur la cécité dont Servient était atteint de l'œil droit, cf. TALLEMANT, op. cit., t. 1, p. 370 et t. II, pp. 1 94-95; les contemporains en tiraient souvent matière à plaisante rie, en utilisant par exemple le surnom de Monacu/us. 6 Ace propos, le gazetier anonyme (ms. f. fr. 25025, f'l 1 9v) rapporte la nouvelle officieuse que des conspirations contre le cardinal Mazarin auraient été ourdies lors des contrastes entre celui ci et le prince de Condé ("il y avoit eu des conspirations contre la personne du Cardinal dont on accuse le marquis de Noirmontier et le baron de Laigue, qu'on a dit en avoir fait mesme la pro position à M. le Prince lorsqu'il estoit en different avec S .E."); en effet, le Cardinal était enfer mé au Palais Royal depuis "cinq semaines" (ibid.) et ne sortait point. 7 Cf. lett. 1 65. Le comte Broglia semble avoir été en contact épistolaire avec le Cardinal et avoir eu avec celui-ci un rapport assez confidentiel, comme le prouve le témoignage de la gazette ano nyme. A la date du 23 juillet, ce texte rapporte la nouvelle suivante: "on eut advis de Catteau Cambresis, que le comte Broglio, mareschal de camp, se faisant force de la faveur qu'il a auprés de M. le Cardinal avoit trouvé à redire à la conduitte du comte d'Harcourt dans l 'armée, mais que celui cy l ' avoit bien gourmandé là dessus." (f'62v); plus tard, au mois de septembre, "M. le Car dinal receut une lettre du comte de Broglio mareschal de camp par laquelle il luy proposat de fai re fortiffier Condé en disant que ce seroit une forte espine au pied de 1 'ennemi" et il demandait pour lui le gouvernement de cette place au cas où elle serait foritfiée (f'96r), mais cette proposi tion ne fut pas accueillie. On peut donc imaginer que celles-ci soient quelques-unes des raisons qui causaient son mécontentement aux égards du Cardinal.
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