La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

386 Correspondance d'A. Bailly - 1 649-1650 Royale me fit la grace d'escrire à nostre Pere General d 'agreer ce retour, qui se­ rait pour la gloire de Dieu, ce sont les termes de sa lettre. Ah, Mademoiselle, quelle gratitude, et qu 'elle doit faire exemple! Ja'y mis quatre mois en Piemont pour le seul service de celuy qui vous escrit, toute la court le sçait. Et il veut vous persuader que tout ce temps a esté emploié à le tromper, et à faire des in­ trigues. Je me console en l 'innocence de ma vie. Saint Paul, mon Patron, a es­ té comme moi appellé, dans la plus grande ardeur de son zele, intrigueur, et trompeur. / (f03v) "Je vous ai fidelement servi, Corinthiens", disait-il, "et pour recompense, vous dittes qu ' estant fourbe, et intrigueur, je vous ai trompés, et trahis. Quod cum essem astutus. dola vos coepi . " I O En un mot, Mademoiselle, on ne rn 'a point appellé traistre dans l e service de Madame, ni accusé de ces noires, et en01mes offences si dignes de punition, et lesquelles neantmoins l 'incomparable bonté de S.A. a si genereusement par­ donées. Elle est, en sa qualité de souveraine, imitatrice d ' un Dieu, et comme il est une cause universelle et point pouPl tout partiale, par cette raison je dois croire que Madame Royale ne punira pas en ma personne\des pechés veniels/r, n 'aiant pas puni des offences\mortelles/ en tant d 'autres. Mais je passe delica­ tement sur cette matiere, et supplie humblement l 'auteur de vostre lettre \de considerer/ qu'aiant jusques à present parlé de moi comme d ' un ange,5 il ne sera pas estimé de se retracter1 1 • Et certes il devrait faire cette reflexion, que la main qui a brulé vingt cinq ans durant de l 'encens à une\image/1, car il m ' a plus aimé que tous les hommes du monde, n'a pas bonne grace , et semble n 'estre pas la mesme, de luy jetter de la boue, et de l ' ordure, comparable à ces anciens qui mettaient en pieces les statues de leurs dieux quand ils n 'en obtenoient pas tout ce qu 'ils desiroient. Qu ' en dira-t-on à la court?u Les politiques seront ravis de joye que le seul qui l ' a servi, et cheri parfaitement, et sans interest soit contreint de le quitter, et de confesser ce qu ' il n ' avoit jamais voulu avouer. 0 qu'il se fait tort! J'ay trop parlé de moi. Parlons de ses interests, que j ' ay trahis, comme il suppo­ se, et de vostre reputation, qu 'il m' accuse d'avoir noircie 1 2. Pour ses interests, IO p aul, Lett. Cor. 6, 1 1- 1 2. 1 1 Ici, l'auteur de la lettre à Mlle de Rossillon calomniant Bailly semble être Saint-Thomas, qui connaissait Bailly depuis les années 1 620 (cf. lett. 99, note 6). Toutefois, au paragraphe suivant, l'usage du possessif ( "ses interests") et du pronom personnel de troisième personne ("M. de Saint-Thomas luy offrit...") semble l'exclure. 1 2 Dans la lettre 207, Bailly transcrit les mots exacts de son accusateur.

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