La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

34 Correspondance cf'A . Bailly - 1649- 1650 4. Lexique Le souci de clarté qui, malgré les quelques exceptions que nous avons signalées, est présent en filigrane au niveau morpho-syntaxique, est encore plus évident dans les choix lexicaux; le vocabulaire de Bailly trahit sa volonté de se conformer au bon usage, tel qu'il avait été fixé par les grammairiens contemporains ou tel qu 'on pou­ vait le saisir par la fréquentation de la cour; voilà ce qu' il écrivait à la duchesse de Savoie le 2 1 mai 1 649 (lett. 1 26): Je doisprescher cesprocheines/estes de la Pen­ tecoste devant la reyne d'Angleterre, et devant bien du beau monde, et ilfautfaire provision de belles paroles, dans le dictionnaire de M. de Vaugelas. L'auteur des Remarques est donc considéré le modèle à suivre et la référence en matière de lan­ gage, ce que les lettres témoignent de façon évidente. Nous ne signalerons que quelques exemples choisis au hasard parmi les nom­ breuses remarques possibles à cet égard. Pour ce qui est du substantif parricide, Bailly se conforme au bon usage en utilisant ce terme dans une acception élargie, comprenant "non seulement (...) celui qui a tué son pere, comme la composition du mot le porte, mais tous ceux qui commettent des crimes enormes et desnaturez de cette espece"S I ; il est donc utilisé pour désigner le crime commis par Cromwell en­ vers le roi Charles 1, puisque tuer "son Prince, ou trahir sa Patrie (...) tient lieu de pere"52. Dans le domaine des verbes, il a recours rarement à des termes sortis de l'usage et il choisit de préférence la forme la plus en vogue: c 'est le cas de la péri­ phrase avoir acoutumé, qui remplace toujours le verbe souloir, vieilli53. Les exemples contraires, de mots proscrits parce que sortis de l 'usage ou consi­ dérés trop populaires, sont donc rares: notre corpus contient entre autres les mots endever (lett. 1 50) ou barragoin (lett. 1 30), considérés comme apparte­ nant au langage du peuple54, ainsi que des termes comme cache (lett. 1 08 ) , qualifié comme vieux e t burlesqueSS, ou encore l ' adverbe partant (lett. 1 6 1 ) e t l 'expression /ai r e unepiece à quelqu ' un (lett. 1 25 ) , signalés par Vaugelas com­ me étant respectivement ancien et populaire56. Les italianismes, pourtant as­ sez fréquents à l ' époque, sont très rares dans ses lettres; cela est peut-être dû 51 c. FAVRE de VAUGELAS, op. cit., pp. 388, 488. 52 Ihid. 53 Jbid., p. 24 1 . 54 A. FURETIÈRE, Dictionnaire universel contenant généralement tous les motsfrançais (. . . ), La Haye-Rotterdam, Arnoul et Reiniers Leers, 1 695, 2 vols, t. 1, p. 500; Dictionnaire de /'Acadé­ mie Franç·aise, sixième édition, Paris, Firmin-Didot, 1 835, 2 vols, t. 1, p. 1 59. 55 Dictionnaire de l'Académie (. .. ), cit., t. 1, p. 243. 56 C. FAVRE de VAUGELAS, op. cit., pp. 225 (partant) et 3 16- 1 8 (faire pièce).

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