La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello
422 Correspondance c/'A. Bailly - 1649-1650 "II est vray", dit-il, "Elle desire cette alliance passionement, mais elle ne se peut faire qu ' en cas que le Roy d ' Espagne ait des enfans males de sa femme, ce qu'on n 'espere point20. Et si cela estait, il estait aussi indubitable que le Roy auroit epousé vostre princesse, puisqu' il n ' y auroit eu qu ' elle seule dans toute l 'Europe digne des nopces de Sa Magesté." Je fis une double replique à cette instance, parcequ 'elle estait conditionele et double. Au premier chef, qui estait de l ' attente, je dis qu'el le estait bien incertaine, puisque le Roy d 'Espagne estant encore d ' âge d' avoir des enfans d ' une jeune femme, quand il n ' en auroit pas de dix ans, ce retardement n'empescheroit pas la Reyne, ni le Conseil d 'esperer, et de retarder le mariage du Roy. En quel cas, nostre princesse auroit perdu l ' occasion de l ' alliance de Bavieres, d ' ailleurs si considerable, et de plus, ne se mariant point, mais attendant l 'occasion, et l 'honeur d'epouser le Roy, sans doubte sa constance auroit pu choquer la Reyne, qui aurait tous-jours consideré nostre princesse comme une persane que le Roy auroit pû desirer, et epouser, au prejudice de la niepce. Et le Roy d 'Espagne venant à avoir des enfans, la / (f04r) princesse Adelaide auroit esté sans mari, et un peu confuse. Il avoua tout ceci, et ne fit que repondre que, si ces choses fussent arrivéesf, il aurait fallu mettre la princesse dans un cloistre. "Cela aurait esté bon en France", luy d is-je, "mais non pas en Piemont, Madame Royale estant trop chrestienne, et trop mere pour faire cette v iolence à une fille bien aimée." Au dernier chef, qui estait de la disette des princesses pour le Roy, je dis que Mademoiselle pretendoit au mariage de Sa magesté, et que Son Eminence le luy faisait esperer, en cas que celuy de ! 'Empereur ne reussit point. Et qu ' en effet, Sa Magesté Imperiale aiant donné sa parolle pour l 'ail iance de Mantoue depuis peu2 I (dont ce comte demeura d' accord), il estait de la dignité de Mon seigneur le Cardinal de tenir parolle à Mademoiselle, et de luy mettre la courone sur la teste. Cette objection assés adroite fit rire ce comte, et le mit en peine. Et comme je conus assés qu'il voulait que je comprisse que ce mariage ne se ferait jamais, pour l ' inegalité des âges, et pour d'autres raisons, je dis sur cet article 20 Cela arriva pourtant en 1 66 l . cf. note 1 8. 2 1 C'est-à-dire le mariage entre Charles II, duc de Mantoue avec Isabelle-Claire d'Autriche, archiduchesse d 'lnnsbruck.
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=