La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello
438 Correspondance d' A. Bailly - 1 649-1650 de Saint Eustache4, au grand regret de tous ceux qui le cognoissoient; il avoit des ja esté attaint deux ou trois fois d'une oppression de poitrine tres violente, qui luy ostoit la respiration, mais il en estoit quitté au mesme temps qu'on luy ouvroit la veyne. Le jeudy, jour de Saint MathieuS, il alla faire ses devotions à la parroisse sans aucune incommodité; le vendredy il travailla beaucoup à faire ses depeches; un de ses bons amis luy dit que s'il n'y prenoit garde, ces depeches le depeche roient; il ne fit que s'en rire, et le soir il souppa de fort bon appetit; il se coucha sur la minuict, et dormit fort bien jusques à six heures, que son valet, le sentant remuer dans son lict,b l 'aborda pour sçavoir s ' il avoit quelque incommodité; il dit qu 'il luy sembloit que son oppression le vouloit attaquer; on luy proposa aussitost son remede de la saignée; on le fit, mais le mal, au lieu de cesser, s 'augmentoit; ce que voyant, ce serviteur de Dieu demanda son confesseur; on l ' alla promptement l 'appeller, comme aussi Monsieur de Villaret son nepveu; mais ils arriverent tous deux trop tard, ils le trouverent mort. Je m'asseure que cette mort vous touchera bien vivement; pour moy, / (f. 1 v) je ne sçay où j'en suis, considerant la perte que faisons de cet amy; pour ses affaires, je ne sçay comme elles iront; Monsieur de Villaret vouloit faire sceller par un commissairec, le secretaire de Madame de Carignan6 ne le trouve pas à propos, disant qu 'il suffiroit qu' ils y mettent eux mesmes chascun leur sceau; la proposition estoit passable, mais l 'execution ne s'en est pas ensuivie, car on n'a pas permis à M. de Villaret d'y apposer son sceau, et on s'est contenté de celuy du secretaire; par ce moyen, tout est à leur discretion. Il y a quelque temps, que par hazard je trouvay sur vostre table une sedule escripte et signée de la main de M. de Vaugellas, qui confesse avoir receu de Vostre Reverence au mois d'aoust dernier, et promet de paier<I a vostre volonté quatre pistoles. Je l 'ay faict voir àMonsieur deVillaret pour ne les laisser perdre; il ne m'a sceu donner aucune resolution; je ne manqueray pas d'avoir l 'œil pour en estre payé, s'il est possible; ce pendant vous pourrez aviser ce qu'il qu'il y aura à faire. Il y a une autre nouvelle, presque aussy triste que celle cy, je n 'ay pas le cœur de l 'escrire7, je m'en rapporte à ce qu'en dira la gazette; enfin, c 'est l ' incons- 4 Puisque ces lettres sur la mort de Vaugelas ont déjà fait l ' objet d'une étude approfondie (cf. G. MOMBELLO, Une lette inédite ( . . . ) 7 janvier 1 650, cit.), nous nous bornons aux notes essentielles. 5 Le 24 février. 6 Vaugelas était précepteur des enfants mâles de la princesse de Carignan. Cf. G. MOMBELLO, Vaugelas précepteur (. .. ), cit.. 7 Il s'agit de la nouvelle de l'enlèvement des sceaux au chancelier Séguier, cf. lett. 1 90, n. 3
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