La correspondance d'Albert Bailly Volume II Années 1649-1650 publiée sous la direction de Gianni Mombello

72 C11rrespo11du11C"c d'A. Bailly - 1649-1650 gueville est allé en Normandie, escorté d'un regiment de Cavallerie et d ' Infan­ terie qui sont de retour!. Il a porté, dit-on, poura deux cent mille escus de lettres de change destinés à lever des gens de gueJTe. Il est allé droit àb Can5 pour ren­ forcer le chasteau dont il est gouverneur. Delà il ira à Dieppe, et de Dieppe à Rouan. Des-ja toute la basse Normandie est soubs les armes. Tous les peuples depuis Limoges jusques ici les ont aussi prises. Troie6 a desarmé la garnison, et s 'est declarée pour le Parlement. Reims,c Sens, et Auxerre en ont fait autant. On croit qu'Orleans ne suivra pas leur exemple, aussi peu Chartres, et Melun qui sont pour le Roy7. Voi la, Madame, une horrible, et funeste ouverture de guerre civile. / (f0 1 v) Surene8 a esté brulée cette nuict passée. Le bled est extremement rare, et cher à Paris. Le peuple commence de crier à la faim. Le setier du froment me­ diocre couste des-ja dis, et douze escus, c ' est à dire cent, et vingt9, et tant d 'es­ cus le mui, et M. le Lieutenant Criminel vient de me dire qu ' il en faut seize cent muis chaque semaine pour la provision de Paris. Et il faut douze setiers pour chaque mui. 4 Le duc de Longueville était parti le 18 ou, selon d'autres sources, le 20 janvier pour se rendre en Nonnandie "avec trois cens chevaux" (Journal du Parlement, cit., 20 janv.; Dubuisson-Aubenay, op. cil., t. 1, p. 1 24-25 parle de cent cavaliers, tandis que le ms. f. fr. 25025, F20r parle de quatre cents chevaux, réduits à cinquante lorsqu'on atteignit la distance de 7 ou 8 lieues de Paris); il comptait dé­ fendre son gouvernement et y lever des troupes. Le gouverneur de Rouen, Ectot, pennit au duc de Longueville de s'introduire dans le Vieux-Palais mais le Parlement de Rouen. qui s'était déclaré pour la Fronde, refusa l'entrée du comte d'Harcourt dans la ville; celui-ci fut donc obligé de se reti­ rer dans la place-forte du Pont-de-1'Arche. Il déploya toutes ses forces pour couper le débouché sur la mer aux frondeurs rouennais et parvint à s'emparer des postes stratégiques de Pont-Audemer et Quillebeuf. CHÉRUEL, op. cil., t. III, pp. 1 64-65 et 226-28. 5 Recte: Caen. 6 Recte: Troyes. 7 La portée de la Fronde dans les provinces de France est estimée différemment par les contem­ porains; le cardinal de Retz, dans ses Mémoires (Oeuvres, éd. par M. T. HtPP et M. PERNOT, Pa­ ris, Gallimard, 1984, "Bibliothèque le la Pléïade", p. 27 1 , dresse un tableau du royaume où presque toutes les provinces se seraient déclarées pour le Parlement de Paris; par contre, la cor­ respondance et les carnets de Mazarin, étudiés par A. CHÉRUEL, op. cit., t. III, pp. 222-24, mini­ misent l'importance de la Fronde provinciale; quant aux villes citées par Bailly, il faut signaler que le marquis de Vitry, neveu du maréchal de !'Hôpital chargé de veiller sur la Champagne, avait pris le parti de la Fronde et à Reims, le gouverneur La Vieuville avait été chassé par les fron­ deurs. Melun prendra parti pour la Fronde au début de février (Guy PATIN, op. cil., p. 633). 8 Suresnes (Seine), à quelques kilomètres de Paris. 9 Le 20 janvier, Dubuisson-Aubenay signalait que le prix du pain était augmenté du triple, et celui de la farine du double (op. cir., t. I, p. 1 24).

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