La correspondance d'Albert Bailly Volume III Année 1651 publiée sous la direction de Gianni Mombello
8 Correspondance d'A. Bailly - 1651 ou de l' autre style dans les lettres, en tenant compte du sujet à traiter et des relations existant entre les correspondants. Le style est donc une notion floue et difficile à définir10• Il doit s' adapter aux situations de la vie sociale et il apparaît comme un concept rigoureux, comme un moule qui, appliqué à tout type d' écriture, en impose la forme. Bailly connaît les conventions qui sous-tendent la rédaction des lettres et il se conforme aux règles dictées par les contraintes sociales. Il n' hésite pas à se servir des figures de style de la rhétorique classique1 1 • Dans les lettres qu' il adresse à l a duchesse nous retrouvons par exemple certains des topoi propres à la lettre mondaine. Il loue les qualités de Christine, en accentuant ses mérites et ses vertus12• Il exalte la beauté de la blondeur de ses cheveux dans un long développement13, il affiche son humilité et sa modestie14, il déclare sa fidélité aux ducs de Savoie et leur offre ses 1 0 À propos du style au XVIIe siècle cf. Jean MOLINO, Qu 'est-ce que le style au XV/f' siècle?, dans Critique et création littéraire en France au XV/f" siècle, Colloques internationaux du Centre National de la Recherche Scientifique, n° 557, Paris, 4-6 juin 1 974, Paris, Éditions du C.N.R.S., 1 977, pp. 337-356; Bernard BEUGNOT, Style ou styles épistolaires?, dans «Revue d'Histoire Littéraire de la France», 78, n. 6, 1978, pp. 939-949 et Georges MOLINIÉ, Style et littérarité, dans «Littératures classiques», n. 28, 1996, pp. 69-74. Il Sur la rhétorique j usqu'au début du xvrre siècle cf. Marc FUMAROLI, L 'âge de l 'éloquence. Rhétorique et «res literaria» de la Renaissance au seuil de l 'époque classique, Genève, Droz, 1 980. 12 Nous nous bornons à en donner quelques exemples significatifs: «Le siecle de Chrestienne de France sera plus fameux dans l'histoire que ne l'a estéjusqu'à present le siècle d' Auguste et la posterité aura sans doubte plus de veneration pour ce que la nature aura produit, ou pour ce que l'art aura fait en ce temps ici, que nous n'en avons pour ce qui nous reste, de ce temps là» (doss. 239/A, fO 2r); «Il ne s'estjamais veu une constance si bernique dans les grandes adversités, que celle que vous avés temoignée dans toutes les vostres, et personne n'a jamais si bien mérité que V.A.R. cet auguste nom de Chretienne, qu'elle porte» (doss. 250/A, fO 2r); «V.A.R., par une dernière bonté qui occupe tout mon esprit à en penetrer la grandeur infinie et tout mon coeur à en gouster les celestes douceurs, a fait cet excés, pardonés, Madame, à ce mot, d'escrire de sa main à ce mal-heureux des choses dont un monarque feroit gloire et, peut estre, vanité» (doss. 236/A, ff. 2r-2v). On comparera à ce propos ce qu'écrivait Paul Jacob dans son traité: «Il est quelquesfois bon de commencer par l' exaggeration des mérites ou des bienfaits de la personne à qui nous escrivons, luy tesmoignant toute sorte de reconnaissance. On peut aussi commencer par ses vertus, sciences et par tout ce qui pourra acquerir sa bien veillance loüant toutes ses raretez aussi bien que la personne à qui elles rencontrent» (Paul JACOB, op. cit., pp. 58-59). 13 Cf. doss. 227. 14 «Oserois-je bien supplierV.A.R., Madame, de me dire si elle pensoit à ce qu'elle mettoit sur le papier, lorsqu'elle escrivit ces choses? Ne croioit-elle point d'escrire au Pape ou au
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