La correspondance d'Albert Bailly Volume III Année 1651 publiée sous la direction de Gianni Mombello

Introduction 1 7 dè robe, prétendait rétablir ses propres privilèges e t mettre un frein au pouvoir du Parlement. Son but était d ' instaurer une mon � rchie moins «absolue», où l' autorité du souverain serait tempérée par les Etats. Comme l ' affirme Michel Pernot, la noblesse «ne prétend pas entreprendre une révolution mais restaurer un état de choses ancien perturbé par la tyrannie des cardinaux- ministres et confirmer par conséquent aux princes de sang la prééminence que la naissance leur confère traditionnellement dans l ' É tat»49• La reine était bien consciente du risque que la concession des É tats Généraux pouvait représenter pour la monarchie dans un moment si délicat: ils pouvaient imposer au roi un Conseil de Régence qui resterait en fonction après sa majorité, jusqu ' à ses dix-huit ans. Anne consentit à la convocation des É tats pour le 8 septembre mais les nobles, sachant que le 5 septembre l e roi attendrait l ' âge fixé pour sa majorité et que, par conséquent, la promesse serait automatiquement nulle, exigèrent que la date soit avancée. La réaction du Parlement, qui interdit l ' assemblée, et l ' attitude du duc d' Orléans qui, après avoir soutenu l ' assemblée de la noblesse, menaça de la faire disperser par les armes, permirent à la régente de ne pas céder sur la date du 8 septembre: ce fut un échec pour la noblesse50• Pendant ce temps Mazarin, sur le chemin de son exil (le 9 février le Parlement avait enjoint au cardinal de quitter la France dans un délai de quinze jours)51, ayant été informé que le 10 février la reine avait été forcée de signer l'ordre de délivrer les princes sans condition, décida de faire un détour au Havre pour les libérer lui-même, en croyant ainsi pouvoir se réconcilier avec eux et, comme le dit le père Bailly: «pour les obliger par cette faveur à le proteger contre ses enemis»52• En réalité ce geste ne servit pas à calmer Condé «qui le traita avec beaucoup de haulteur et qui ne lui fit pas le moindre remerciement de la liberté qu'il lui donna après avoir disné avec lui»53• 49 Michel PERNOT, La Fronde, Paris, Éditions de Fallois, 1994, p. 255. 50 Les États furent encore ajournés et, fmalement, ils n'eurent jamais lieu. 51 Mazarin erra jusqu'au 1 0 mars avant de se réfugier à Bouillon, dans la principauté de Liège, et ensuite à Brühl, accueilli par l ' é lecteur de Cologne. C'est de cette ville qu'il entretint une correspondance active avec Paris. 52 Cf. doss. 2 1 4/A, f' lv. 53 Cardinal de RETZ, Mémoires, dans Œuvres, édition établie par Marie-Thérèse HIPP et Michel PERNOT, Paris, Gallimard («Bibliothèque de la Pléiade»), 1 984, p. 595.

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