La correspondance d'Albert Bailly Volume III Année 1651 publiée sous la direction de Gianni Mombello

192 Correspondance d'A. Bailly - 1651 Tout Paris le comble de louanges pour s' estre retiré au plus fort des bonnes graces de S .A.R. et de luy avoir persuadé de luy permettre sa retraite1 1 • La Reyne n' ose point le choquer, tant à cause de s a moderation presente, que pour la puissance de sa cabale, qui se rend tous-jours plus populaire. Toute la fronde jette des pierres à M. le Prince, etr creint le traitement qu' il a fait à M[adame] de Chevreuse, aprés luy avoir ouvert la porte du Havre. Et c'est une des raisons qui legfait relascher de ses pretensions, les frondeurs les appellant tout haut entreprises, attentats, usurpations, violence, tiranies. Si la proposition suivante est recëue V.A.R. sera desormais riche. Douze notables bourgeois de Paris, et les plus riches du Royaume, à sçavoir les Marins, les Bonauds et leurs associés, ont proposé au Conseil d'en Haut de paier Il [f° 3r] soixante et cinq mille homes au Roy, toute la depence de la Cour et tous les officiers\ six millions pour ses menus plaisirs, et d ' en avancer presentement cinq de comptant, moienant qu' il leur cede la recette generale et qu' il leur donne M . le marquis de la Vieu-Ville, pour surintendant, dont ils connaissent la capacité et la probité12• Il faut remarquer encore pour montrer l ' opulence de ce Royaume, qu' ils laissent au Roy tous les deniers qu' il tire des entrées du vin, des aides et des douanes, qui sont des sommes immenses. On leur a donné une favorable audiance et ont esté renvoiés à dimanche prochein, où la chose sera decidée au palais de Luxembourg. M. de la Chambre m'a dit que la Reyne estoit, hier, excessivement gaie et enjouée à son disner et que la grimasse que fit le Roy y contribua beaucoup. En voici le sujet. La Reyne est tousjours servie par des femmes quand elle mange, soit en public, soit en particulier, et le Roy aussi, lorsqu'il mange avec elle. 1 1 Gondi s'était retiré de la vie politique. Dubuisson-Aubenay, (cit. , t. Il, p. 52) explique: «On dit que le coadjuteur de Paris pria M. d'Orléans de le laissser retirer et s'absenter de ses conseils. M. d'Orléans y consentit assez doucement. M. le Prince (. . . ) lui dit force choses pour le dissuader en apparence». Bien que retiré dans son cloître, Gondi continuait à avoir des entrevues secrètes avec la Reine. 12 Les Marin et les Bonnau étaient des célèbres familles de financiers. Sur la proposition qu'ils avaient faite pour le redressement des finances de l' É tat cf. doss. 229, note 1 3 .

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