La correspondance d'Albert Bailly Volume V Années 1654-1655 publiée sous la direction de Gianni Mombello

Gazetre 377 235 f' 3r{ On vient de me dire une etranged nouvelle, et que je ne sçaurois croire. C ' est que le prince Razivi l 1 ci s' est accomodé avec le roi de Suede15 contre le roi de Pologne 1", et qu ' on veut degrader celui ci, et prendre le premier pour protecteur du royaume contre les Moscovites. Le mareschal de Turene l ' a emporté sur Monsieur Faber1 7, et a fait assieger Landrecil8• On ouvre au-jour-d' huy les tranchées. Il y a trois attaques. La '" La situation de la Pologne en 1 655 était particulièrement tourmentée. À la mort du roi Ladislas IV Wasa, en 1 648, la reine veuve. Louise-Marie de Gonzague, réussit à éviter provisoirement que la couronne polonaise passe aux mains des Suédois en épousant son beau-frère, le prince Casimir. Au cours des années suivantes, la révolte des Cosaques contre la noblesse polonaise et le conflit avec les Tartares achevèrent de ruiner la nation, qui devint plus que jamais l ' objet de la convoitise de ses voisins. Le roi de Suède, Charles-Gustave, était le fils de Jean-Casimir, Palatin des Deux-Ponts et de Catherine Wasa, fille du roi de Pologne Charles IX; à cause de cette ascendance maternelle, i l aspirait à la couronne de Pologne; de son côté, Jean-Casimir Wasa voulait disputer le trône au roi de Suède, qui avait succédé à la reine Christine après l'abdication de celle-ci . En 1 655, Janusz Radzivill, prince de Birze et de Dubinski, qui avait déjà provoqué la rupture de la diète en 1 652, entra en contact avec les suédois, ennemis de sa patrie, et les incita à envahir la Pologne, malgré la trêve qui engageait le roi de Suède jusqu'en 1 66 1 . Charles-Gustave de Suède envahit donc la Pologne à travers la Poméranie, avec le consentement de !'Electeur de Brandebourg et le 2 1 juillet, il entra en Grande-Pologne où, au lieu d'être repoussé, il fut proclamé protecteur de la Pologne. Cet exemple fut suivi par les v illes telles que Varsovie et Poznan. Cf. W. SOBIESKI, Histoire de Pologne des origines à nos. jours, Paris, Payot, 1 934, pp. 2 1 0- 1 3. " Charles-Gustave comte Palatin des Deux-Ponts ( 1 622- 1 660), cf. Con: III, p. 39 1 , n. 2. 16 Jean-Casimir Wasa (1 609- 1 672), ibid. p. 1 07, n . 1 3. 17 Abraham Fabert ( 1 599- 1 662). nommé d' abord maréchal de camp et puis l ieutenant général ; en 1 650, il obtint le titre de maréchal de France (en 1 658 d'après C. PINARD, op. cit., t. Il, pp. 6 1 0- 1 1 ) . Gouverneur de Sedan après la démission du duc de Bouillon. à la fin de la Fronde parlementaire, i l était l ' un des hommes de confiance les plus fidèles de Mazarin . En 1 654, Fabert commanda de l ' armée destinée à servir au Pays de Liège pour !'Electeur de Cologne et il s'empara de Limbourg et des É tats de Liège. Revenu à Sedan le 20 avril, il commanda l ' armée royale qui s'était assemblée sur la frontière de Champagne et assiégea Stenay au mois de juin. En 1 655, il eut ordre d' attaquer la ville de Mézières et i l en obtint le gouvernement après sa reddition. Bailly fait ici allusion au fait que l 'année précédente, le commandement de l ' armée royale dans la guerre de Flandre (nota1mnent au siège de Stenay) avait été donné à Fabert. Sur ce personnage, cf. DBF, t. XIII, col. 367-68; J. BOURELLY. Le maréchal de Fabert, étude historique d 'après ses lettres et des pièces inédites, Paris, Perrin, 1 885, 2 vols. 1 8 Le siège de Landrecies avait été entrepris à partir du J 8 j uin 1 655, sous la direction de Turenne et de La Ferté (cf. note suivante); en effet, au cours du mois de juin 1 655, l ' armée royale avait été réunie à Guise et le conseil de guerre avait décidé de prendre l 'offensive. Une armée de douze mille hommes fut envoyée assiéger la place, qui fut aussitôt secourue