La correspondance d'Albert Bailly Volume V Années 1654-1655 publiée sous la direction de Gianni Mombello
38 Correspondance d 'A. Bailly - 1 654- 1 655 reste i l n ' y avait pas / (F4r) apparence de faire repasser les soldats en France par une si rude saison, que V.A.R. avait trop d ' humanité pour les vouloir perdre, et que sa pitié mesme attirerait sur elle l ' amour, et les bienfaits de la Cour. Il adjou ta qu' il avait un present tout prest à luy envoier, mai s qu ' i l n' osait en prendre l a hardiesse tandis qu' elle serait en colere. Comme il aperceut que je riais entendant ces belles choses, il m' en demanda la raison et je luy respondi s sans hesiter que j ' avois bien peine de croire qu' on fût disposé à faire ces profusions à V.A.R. à qui on avoit refusé huict mille francs pour l ' achat de quelque argenterie à compte de tant de millions qu' on doit à l a Savoie9• Il repliqua avec etonnement que je le surprenais, et que si ceste somme n ' estoit pas encore paiée, il l a ferait donner ce j our là mesme. Le voiant de bonne humeur, je dis que V.A .R . estait bien plus / (f° 3v) diligente à servir la France, et qu' il y a trois ans, que revenant du Chap[itre] General, je vis donner à M. l'Ambassadeur son frere1 0 huict mille francs pour le service du Roy par vostre commandement, et qui estaient destinés au batiment de vostre Vigne de la Montagne1 1 , et cela au mesme moment qu' i l les eut demandés ; et qu' i l devait m ' excuser si je luy disais qu' on se noioit dans un verre d' eau, et qu' il fallait bien mieux conserver qu' on ne faisait une si puissante, si fidele et si i mportante alliée. J' adj outei encore qu'on ne devait jamais vous envoier des generaux qui ne vous fussent agreables, et moderés 1 2• Il accorda d ' abord cet article et comme je l uy ' Parmi les sommes d' argent dues par la France au duché de Savoie figuraient, à cette époque, les cent quatorze mille livres assignées en 1 652 sur les tailles du Dauphiné à titre d' indemnisation partielle des dommages subis en 1 65 1 par le stationnement prolongé des troupes espagnoles dans les territoires du duché (cf. A.S.T., Corte, Lettere Ministri - Francia, m. 59, fasc. 1 - Registro lettere della Corte, 1 652- 1 656, lettre du 1 0 février 1 652 de Madame Royale à l 'ambassadeur Aglié, p. 30). Sur cette question, cf. le mémoire inédit de S. V I GNAU, La correspondance inédite de Michel de Bonnefont, secrétaire de ! 'Ambassade de Savoie à Paris (janvier-mai 1 654), Università di Torino, a. a. 2001 -2002, pp. 26-27). Dans la lett. 35 1 (cf. en particulier la n. 6), Bailly annonce à la duchesse qu'en 1 654, la France donnerait quinze mille livres pour l ' entretien des troupes. 111 Ennemond Sevient ( 1 596- 1 679), ambassadeur de France en Savoie depuis 1 648. " La 'Vigne de la Montagne' de Christine de France était une demeure située sur la colline turinoise, en face du château du Valentin. La duchesse ! ' avait fait construire entre 1 648 et 1 653, pour ses rendez-vous galants avec Philippe d 'Aglié. Gravement endommagée en 1 706, cette construction fut démolie en 1 750; l a villa qui surgi t actuel lement sur l 'emplacement de la Vigne remonte au XVIII' siècle. Cf. A. GRISERI, /l Diamante. La villa di Madama Reale, Torino, Istituto B ancario San Paolo, 1 988. " Bailly fait allusion ici i ndirectement au maréchal de Grancey, qui avait été très irrespectueux envers la duchesse (cf. n. 4).
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