La correspondance d'Albert Bailly Volume V Années 1654-1655 publiée sous la direction de Gianni Mombello

88 Correspondance d 'A. Bailly - 1 654- 1655 et favoriser quelque dessein du Pape. / (f03v) Aprés la disgrace du Cardinal Pamphi l i o20, le mariage de Modene2 1 , la l i berté promise au Card i na l de Rets22 (et qu i va estre b i en tos t remi s à M. de l a Mes l i araie21 son parent) e t l es soins que Son Eminence prend de faire executer par tou t le royaume la bulle du Pape contre les Jansenistes24, on ne doubte point que "' Le nom de Cardinal Pamphilio avait été donné par Innocent X au Cardinal Astalli, cf. gaz. 337, n. 3. Il avait été accusé d'avoir trahi le Pape en livrant à l ' Espagne les secrets de la cour pontificale sur l ' attaque au royaume de Naples. " Bailly se réfère au mariage du duc Francesco 1 d'Este avec Lucrezia Barberini (cf. gaz. 337, n.5). En outre, à la fin de l' année 1 654, le duc de Modène se rendit en France pour traiter le mariage de son fils Alphonse avec Laura Martinozzi, nièce de Mazarin. En effet, dès 1 653, Mazarin avait essayé de rattacher la maison d'Este à la France et à cet effet, il avait envoyé en Italie des gens de sa confiance pour étudier la situation et pour trouver des alliés parmi les princes italiens. Le mariage entre le prince de Modène et la 'Mazarinette' eut lieu en mai 1655; cf. A. CHÉRUEL, op. cit. , p. 1 87. '' La libération du cardinal de Retz, qui se trouvait à Vincennes depuis plus d'un an, avait comme condition sa résignation du titre d' archevêque de Paris, qu'il aurait obtenu à titre définitif à la mort de son oncle (survenue un jour après la date de cette lettre, le 2 1 mars 1 654). En effet, du fait de ses fonctions de coadjuteur, Retz était l 'archevêque légitime de Paris, reconnu comme tel par le Pape, le nonce Bagni, le chapitre de Notre-Dame et les Curés. Retz établit à son tour comme condition à sa démission qu'il fût transféré ailleurs; en effet, le 30 mars il fut amené à Nantes et remis au duc de La Meilleraye en attendant la réponse de Rome concernant sa démission. En réalité, à Nantes Retz était encore prisonnier, car malgré la courtoisie du duc, il était constamment surveillé par des gardes. 21 Charles de La Porte, seigneur de La Meilleraye ( 1 602- 1 664), maréchal de France, puis duc et pair. Il était cousin de Richelieu et son fils, Armand-Charles, épousa Ortensia Mancini, l 'une des n ièces du Cardinal. Pour la parenté du duc de la Meilleraye avec Retz, le lien fut créé par le frère de sa femme, Marie Ruzé d'Effiat, qui avait épousé une cadette de la maison de Retz. Cf. Mémoires du co1nte de Brienne, cit., p. 1 47 et Corr. I, p. 2 1 8, n. 4 et passim. '" Il s'agit de la bulle Cum Occasione (3 1 mai 1 653 ), qui condamnait les cinq propositions présentées en 1 649 à la Sorbonne. Le clergé de France l ' avait soumise à l' autorité du Pape, car le document pontifical, qui consistait en une Constitution en forme de bulle, dénonçait comme hérétiques les cinq propositions, mais il ne prenait pas une position explicite sur le sens jansénien de celles-ci pour faire en sorte que la soumission du clergé janséniste puisse se faire sans problème. En effet, la querelle religieuse avait pris de plus en plus une coloration politique: pour Mazarin, la question de l' antijansénisme était un moyen pour déstabiliser le cardinal de Retz qui, pour obtenir le chapeau en 1 652, avait dü se j ustifier des accusations de jansénisme; en même temps, pour le Pape, le fait d' avoir été sollicité sur des questions doctrinales impliquait une plus grande autorité sur !'épiscopat français, ce qui aurait pu signifier la fin non seulement du jansénisme, mais aussi du gallicanisme. Pour cette raison, une alliance avec Mazarin présentait pour le clergé des avantages impmtants. Cf. J. M. GRÈS-GAYER, Le jansénisme en Sorbonne, 1 643- 1656, Paris, Klincksieck, 1 996