La correspondance d'Albert Bailly Volume VII Années 1659-1663 publiée sous la direction de Gianni Mombello
50 Correspondance d 'A. Bailly - 1 659- 1 663 Faisant presque écho à Saint Anselme qui, au XI" siècle, définissait la Vallée « neque . . . in Gallia, neque . . . in Italia », Bailly commençait donc son argumentation par l ' affirmation que le Duché d ' Aoste n' était pas « citra neque ultra montes sed intra montes », une définition qui a fait fortune 1 2 1 • Ce n' est qu' après qu' i l énumérait les particularités linguistiques, historiques et j uridiques du pays, en l a i s sant sagement à l ' arri ère-plan le caractère ouvertement gallican du clergé. À ce propos, il faut bien souligner le fait que Bailly soutint toujours ses prêtres dans leur gallicanisme disciplinaire et « pratique » 1 2\ en repoussant fermement tout gallicani sme doctri nal et dogmatique. Ce mémoire n ' est n i une p lainte personnelle, ni une demande de faveur. L' É glise d ' Aoste est pauvre, c ' est vrai , mais son évêque évite le pathétique. La question n ' est même pas prise en considération ; on demande avant tout de comprendre les raisons d ' un refus rai sonnable, d' un désir de j ustice. Et le résultat se rapproche ainsi d ' un petit traité de droit civil, plutôt que d' être un traité ecclésiastique. 1 2 .i '" En 1 664, Mgr Bailly réaffirma sa pensée en écrivant : « Civitas et Diocesis Augustensis . . . non u ltra neque c itra montes sed in mediis Alpibus sita est ». Cf. sa « Relation sur l 'état du diocèse » , rédigée à la suite de sa première visite ad limina, BGS, Fonds Gal-Duc, carton XXVIII, fasc. 1 8. L. COLLIARD, La Déclaration gallicane du Clergé valdôtain de 1661, « Cahiers sur le particularisme valdôtain édités par les soins des Archives H istoriques Régionales, X », Aoste, Imprimerie Valdôtaine, 1 973, p. 9. 1 23 L' idée de J ' intramontanisme n'est pas du tout originale. Elle est à la base de la conception de la Patria Augustana, qui est déjà très vivante au Moyen-Age et que les comtes et ducs de Savoie ont souvent reconnue dans leurs documents officiels (la Charte desfranchises de 1 1 9 1 fut le premier). Mgr Bailly lui-même avait déjà cité cette idée dans un mémoire qu' il avait envoyé au duc Charles-Emmanuel Il en 1 659, au début de son épiscopat. Il s'agissait d' un mémoire concernant les droits de la mense épiscopale : « il est notoire que le Val d' Aoste n ' est pas situé en Italie, en deça des monts, mais dans les montagnes, et qu'il est distinct du Piémont par Je langage, les coutumes, les manières » (cf. A L B I N ! , op. cit., p. 33). Dans son mémoire de 1 66 1 , Je prélat ne fait que reprendre ces idées, en les synthétisant et en leur donnant une force et une vigueur nouvelles. Bailly, qui connaît parfaitement la jurisprudence tant ancienne que médievale et moderne, depuis Justinien jusqu' aux j uristes contemporains, expose ses convictions avec une synthèse et une précision admirables et dignes du plus grand avocat. Séverin Caveri doute fort que les Arguments aient été rédigés par Bailly : «je doute fort qu'une thèse de ce genre ait été avancée par ! 'Evêque B ailly : le style est avocassier, farci de citations de droit commun ; l'exemplaire conservé dans les Archives de ! ' Evêché porte d'ailleurs le titre Consult pour le Clergé d 'Aoste. » (S. CAVER!, Histoire de l 'église d 'Aoste. Tome premier, Aoste, R. C. É ditions, 1 992, p. 58).
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