La correspondance d'Albert Bailly Volume X Années 1677-1688 publiée sous la direction de Gianni Mombello
1 1 Lettre 824 1 1 9 prononcer ce discours et non pas le 1 i re 1 1 , estant instruit, depuis quarante ans en ça que je parle en publ ic, de la difference qu ' i l y a à prononcer par coeur et debout un discours et à le l i re seulement1 :> . Et en verité, Monsieur, je n ' ai pas sçeu [sic] comprendre comment on ait pû dire qu ' i l fal loir l i re tout simple ment ce discours, puisque ce n ' etoit pas un ouvrage de cabinet, ni purement d'Academie, comme un sonet, ou un simple rai sonement, que les Italiens ap pe l l ent "leçon", mais c 'estoit un discours fait au genre dernonstratit: où j e loüois et je blamois, q u i sont les deux caracteres d e c e genre, et je n ' a i j amais oui dire qu'on l ise un panegyrique, soit discours etendu et fait pour ouvrir une Academie, où toute l 'eloquence de l 'orateur doit paroitre avec pompe et etre par consequent, soutenue de l ' action du parleur, dont elle est le princi pal ornement 1 3 • Et comme cette action, selon le pere Rapin même, se forme des regards d ' un oeil vif et bien animé, du geste, du port de la persane et de l 'agréernent que toute ces beautés enfantent, il est sans doute que ces sortes de discours ne se doivent point l i re, parce que l a lecture qu ' on en feroit derobe roit tous ces avantages et toutes ces graces à l 'orateur. C 'est sur ce fondement, Monsieur, que je vous conseille de prononcer par coeur votre panegyrique, dont les echanti l l ons que j ' ai veus, sont admi rables et soutenus, comme m'a asseuré Monsieur Chappuis 1 4, de toute l a substance du discours et il seroit domage que tant de beautés manquassent de celle de l 'action. Je retourne à la s implicité du sti le. E l l e etoit dej a en usage, il y a plus de 50. ans, à la cour de feu M . R. Christine et i l me souvient d ' un sonet fait à Querasque où j 'avois l 'honeur d 'etre secretaire de cette princesse1 5. J ' etoi s fort j eune e t deja poetastre. Un de me s ami s avat [sic] eté fort malade e t au retour de sa santé, a l l ant en Careme, tout pale qu' i l etoit, au cabaret onl' fit ce dialogue: 1 1 Bailly avait demandé à plusieurs reprises de lui renvoyer son d iscours "châtié", pour avoir le temps de l 'apprendre. En eftèt, il avait du recevoir des critiques, du moment que le discours qu'il avait prononcé était différent par rapport à la version écrite qu'il avait envoyée à la cour. Cf. la note 3 de la lettre 805 . 1 2 Plus d'une fois Bailly rappelle à ses con-espondants qu ' i l avait été un prédicateur de renom. 13 La querelle littéraire qui opposait les l taliens aux Français n'était pas chose nouvelle à l'époque, mais elle avait trouvé ses origines dès le XIVC siècle. Cf. G. MOMBELLO, Le discours prononcé par Mgr Bai!�y, art. Cité, en particulier les pages 34 1 -348. Sur la rhéto rique et l'éloquence plus en général, la bibliographie étant trop vaste, nous nous bornons à citer l 'étude de M . FUMAROLI, L 'âge de / "éloquence. Rhétorique et "ries litera ria " de la Renaissance au seul de ! 'époque classique, Genève, Droz, 1 980. 14 Ce personnage a été identifié à la note 6 de la lettre 8 1 9. 1 5 À propos de l'activité de secrétaire de Bai lly cf. la note 6 de la lettre 804.
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