La correspondance d'Albert Bailly Volume X Années 1677-1688 publiée sous la direction de Gianni Mombello

Lettre 904 3 1 3 par tout le monde pour s ' en rendre monarque"4• Soutenés, Monseigneur, ma genereuse passion par vous fo1tifier, ne donés pas à votre grand courage tous les feux qu' i 1 vous demande. /[f0 1 v] Laissés ces chasses, ces cources et tous l es travaux tàtigans. Reposés vous, faites provision de vigueur, vous en aurés0 bien besoin à Lisbone, car Apollon m'a aparu cette nuict, et m' a fait voir une amazone admirable en beauté, et armée de fleches5. "Que voulés vous faire - lui ai-je dit - Madame, de ces dangereuses armes?". "Je veux les emploier -m' a-t-el le repondu - contre ton prince, et me batre avec l ui". ''Mais il faut des armes egales - lui ai-j e representé -, et mon Prince ne se sert poi nt de fteches dans les combats". "Tu te trompes, me repliqua-t-elle, ses yeux en sont tout pleins, et je ne sçauro i s m'en defendre que je ne mette en usage les mie­ nes". "D' accord - l u i repondis-je - flesches pour fleches ! Ma i s prenés garde, on vous lai ssera fai re; on ne vous separera point, et i l y a bien du danger que vous ne mouriés tous deux en ce combat, mais d ' une mort, dont les vivans jaloux voudroient mourir tous". Serieusement V.A.R. doit prendre soin de sa santé plus pour l ' interest de votre peuple, que pour le votre propre. Vous estes, Monseigneur, moins persone privée, que publique1', /[f'2r] et il est sans doute que vous nous devez plus que vous ne vous <levés à vous même. Bon Dieu, que serions nous devenus, si D ieu n'eut fait un mi racle pour vous conserver la vie, et dans quels extremes malheurs ne nous aurait point plongé cette perte! Faites, Monseigneur, s ' i l vous plait, de serieuses reflections sur ces verités qui aprochent des divines, , persuadés vous bien que vous n ' avés que le simple usage de votre vie, et qu'aprés Dieu, vos sujets en ont le domaine. Vous ne pouvés pas donc en dis­ poser contre notre volonté et nous ne vous permettrons jamais, non pas de la prostituer, cette publique et precieuse vie, mais pas même de l 'exposer, sans 4 Nous avons traité le projet du mariage entre Victor-Amédée Il et I 'l nfante de Portugal dans l 'introduction r n 1 ). 5 Notre prélat avait représenté la deuxième Madame Royale sous forme de Pallas, c'est­ à-dire année de flèches. Au dessin qu'il envoya à sa correspondante, il ajouta aussi des vers qui en exaltaient l 'âme guerrière. (Con: IX, Portrait 689. Voir aussi A. AMATUZZT, «Un evesque qui s 'amuse.faire la cour aux nwses». art. cité). Ici il pourrait faire allusion à l ' infante de Portugal. Sur la question du mariage du duc avec elle, nous renvoyons à l'lntroduction ( § 1 ) . ' 6 Mgr Bailly avait déjà exprimé cet aspect dans le panégyrique funèbre qu'il avait pro­ noncé à la mort du duc Charles-Emmanuel I l . A. BAILLY, Pa11egyriq11efimehre de Charles Emanuel, op. cit . . Sur les panégyriques funèbres écrits par Bailly nous nous permettons de renvoyer à notre article les panégyriquesfimèbres de Mgr Albert Bailly, dans Mgr Albert Bailly, quatre siècles après sa naissance, cit., pp. 295-320.

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