La correspondance d'Albert Bailly Volume X Années 1677-1688 publiée sous la direction de Gianni Mombello
380 Currespunda11ce dA. Baillv - 1677- 1 688 d'etre presenté à un si grand et si bon prince; mais aussi i l ne doit pas etre excessif et au dessus de nos forces que la misere q ue nous avons soufferte durant toute cette année à tant affoiblies. Si, dis-j e , nous devons fu i r ces deux extremités, le trop ou le trop peu. Il faut choisir et embrasser cette belle me diocrité qui est la veritable situation de la j ustice distributive, c'est à dire que nous devons faire un donati f à S.A.R. si raisonable qu ' i l puisse avoi r l 'hon neur et l 'avantage de lui plairre et de nous attirer la continuation de ses graces et de sa protection. E t c 'est pour marquer cette med iocrité raisonable et j uste que j 'ai dit et qu ' i l vous en souvienne que nous devons faire profusion de nos b iens à S . A . R. et non pas prod igal i té. I l y a grande d itference entre prodigalité et profusion. La prodigal ité est un vice, parce que le prodigue donne tout, s ' epuie et aprés il faut qu' i l usurpe le bien d'autrui pour subsister, et cette ex tremité est pire même que l ' avarice, car au moins l 'avare se consacre et consa cre son b ien pour subven ir aux besoins de sa famille. La profusion au contrai re est une vertu, ou comme l ' appel lent les phi losophes moraux une demi vertu, semivirtus, parce qu'elle consiste dans la mediocrité, c ' est à dire qu'elle est entre \la/ prodigalité et l ' avarice et se forme du bien qui est dans l 'une et dans l 'autre. Le bien de la prodigalité est le penchant qu ' e l l e donne au prodigue de donner, ce qu i est louable, mais il donne trop et voi l à le deffaut. De même le bon de l ' avarice consiste à faire conserver à l ' avare son bien, et cela est j uste, mais i l le conserve avec trop de soin et d ' inj ustice, et voilà son dereglement. La profusion est entre deux. E l l e fait donner et conserver le bien à propos, et à proprement parler on doit appel Ier ce caractere de profusion menage, qui est une vertu et qu i corrige les deffauts qui se rencontrent dans le prodigue et dans ] 'avare. Pratiquons donc, Messieurs, ce rnenagement. Ne nous epuisons pas pour n ' etre pas prodi gues. Ne donnons pas trop peu pour n 'etre pas avares; mais donnons honetement pour nous attirer et meriter le nom de sages mena gers et de j ustes reconoissans des graces de notre souverain. " +que+: h el sur 111; ' comme+s+: J dires dans le manuscrit; ' +qu+: 1 le sur +·J+
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