Quelques lettres de l'Abbé Joseph Trèves Pierre Gorret

Quelques lettres de !'Abbé Joseph Trèves 99 TRENTE-CINQUIÈME LETTRE. M. Trèves s'efforce d'ensoleiller les heures sombres de mon exil, heures pendant lesquelles je regrettais nostalgiquement de ne pouvoir rien faire pour mon pays : regret que j'emporterai dans la tombe. Les nouvelles qu'il me donne de la Vallée ne sont pas du tout encourageantes, surtout pour ce qui regarde la cause du français. La tactique du nouveau régime totalitaire attire et soumet ses premières victimes. Parmi ces derniers malheureuse­ ment, il en est qui, vu leur position, auraient pu réagir un peu plus énergiquement. Le minuscule recteur de Promiod, fourmic rouge de la montagne, a été laissé trop seul et son optimisme ne fut qu'un effort presque inutile. à la hâte Promiod, ce 1 2 juin 1 925 Mon cher Pierre, C'est toujours avec un plaisir particulier que j� reçois tes chè­ res nouvelles. Je suis heureux que tu aies reçu ma petite étrenne fraternelle de 1 925 , « Torgnon », car je craignais un peu qu'elle se fût égarée dans les ondes de l'Océan. Mais, mon cher, il m'a semblé que tu m'as écrit en un jour où le ciel était un peu nuageux et le soleil un peù malade, comme nous disons ici au Pays . Toi, mon cher Pierre Gorret, un déraciné ? Mais jamais de la vie ! Après tel temps que tu croiras toi, temps que je désire bien court ! , tu vas nous revenir sain et dispos, avec ton talent de l'orga­ nisation, ton ardeur à l 'étude et à l'action triplée eDcore par ce bain d'américanisme de bon aloi où tu as été jeté pour le bien encore de ta chère Vallée natale, certes ! avec ton amour éclairé et inten:;e pour le berceau de tes jours, pour nos traditions, notre histoire, notre langue, nos souvenirs . Le Pays t'attend à bras ouvert, mon cher, et notre Petite Patrie Valdôtairne compte toujoui"s en toi un de ses fils les plus intelligents, les plus fidèles et dévoués, les plus entreprenants . Ah ! mon cher, notre Vallée, déchirée par des divisions fratricides envenimées, empoi-