Quelques lettres de l'Abbé Joseph Trèves Pierre Gorret

INTRODUCTION Caractère primesautier, parfois impulsif, ennemi juré du confor­ misme, du formalisme, de l'immobilisme et de la cabale politique, visant droit au but, pionnier de !'Autonomie, un boute-en-train dans le bon sens, un vrai reboudze-bolài comme un vieux traditionaliste l'a défini : voilà les traits caractéristiques de cette figure originale que fut !'Abbé Trèves. Il fallait bien autre chose qu'un solide balai pour déblayer la poussière accumulée par le temps sur le crâne jauni de certains cerveaux. Ces traits se révèlent aussi dans tous ses écrits. C'est par cen­ taines les lettres qu'il a expédiées à tous les coins de la Vallée et du dehors. Une bonne partie de ses maigres revenus était consumée par l'affranchissement de sa correspondance. Je sais que quelqu'un de ses amis en conserve un gros dossier. A part de rares et brèves citations çà et là, elles n'ont pas encore vu le jour. Les Quelques Lettres que je publie sont une minime part de sa vo­ lumineuse correspondance. A toutes ces lettres conservées jalousement dans mon dossier, j'ai toujours répondu, peut-être un peu tardivement et trop laconiquement. Les occupations et les préoccupations de ce temps-là ne me per­ mettaient pas de m'adonner aux loisirs de la correspondance. La tête de l'abbé Trèves était un Vésuve, un Etna, un Stromboli en continuelle éruption d'idées. Et quand l'une de celles-ci ou une initiative qui lui semblait bonne pour le pays se fixait dans son cer­ veau, il partait en campagne pour en faire la propagande. Et Dieu sait le nombre de clous semés sur les sentiers et les chemins rocailleux de Planaval à Liverogne, de Promiod à Antey ou Châtillon et d'Ex­ cenex à Aoste. Un jour il bondit dans ma chambre comme un bolide, manches de la soutane et de ta chemise retroussées jusqu'aux coudes, souliers ferrés, canne pendue à l'avant-bras, chapeau déformé et penché sur